jeudi 31 décembre 2009

Du chasseur la nuit

La nuit du chasseur* est un chef-d'œuvre. C'est une affaire entendue. Et si j'ai pu un jour avoir envie de l'utiliser comme matériau pour un livre de poésie, c'est, je crois, parce qu'il possède toutes les qualités du conte, et notamment celle-ci : il est inépuisable.
Le titre m'est venu tout naturellement avec l'idée. Je lisais à ce moment-là le deuxième roman de Pierre Alféri, Le cinéma des familles et, je vous le donne en mille, je me suis aperçu en cours de lecture que le livre jouait avec des éléments du film (c'est un conte, je vous dit). J'aurais donc toujours ce doute : est-ce la lecture qui m'a suggéré le projet ? En toute bonne foi, je répondrai que non. Mais il est fort probable qu'inconsciemment ce soit le cas…
Bref. J'ai commencé à écrire les poèmes du livre et, comme souvent chez moi, un autre projet a pris le dessus : Opéras-minute. Du chasseur la nuit s'est arrêté là.
Mais le titre a continué depuis à me hanter et je le destine périodiquement à un autre projet (que je n'écris pas) : ma "théorie" sur le fameux ALVA** de Jean Queval (membre de l'Oulipo) : "Le train traverse la nuit". "Théorie" que je résumerais ainsi : dans La nuit du chasseur un train traverse la nuit (par deux fois). Si l'on écrit :
Le train traverse La nuit du chasseur la nuit
on obtient un alexandrin, qu'on peut se permettre de découper ainsi : "Le train traverse La nuit / du chasseur a nuit" quand on sait que Jean Queval affectionnait particulièrement cette coupe impaire en 7+5.
On peut ensuite imaginer que pour d'évidentes raisons de sécurité, et dans le souci d'éviter une répétition toujours malvenue dans l'alexandrin, il ait souhaité faire disparaître le titre du film-source tout en en gardant une trace, i.e. son début : la nuit, segment qui a le mérite de condenser en deux mots le titre et le moment. L'hémistiche qui en résulte, de 7 syllabes, indiquant quant à lui sans ambiguïté son origine quevalo-alexandrine.
Vous trouvez ça un peu tiré par les cheveux ? C'est sans doute ce que pense aussi mes camarades de l'Oulipo.
Mais j'y arriverai, je démontrerai le lien qui existe entre vers et film ; et le titre de cet essai sera Du chasseur la nuit.
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* The Night of the Hunter (1955), film américain de Charles Laughton.
** Alexandrin de Longueur VAriable.

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