dimanche 29 novembre 2009

Sommes d'Emmanuel Adely

Hier soir vers 23h, je reprends la lecture de Sommes*, fiction d'Emmanuel Adely, commencée il y a quelques jours. Je n'ai auparavant lu que quelques pages, pénétrant à peine la somme de portraits amassés là et trouvant cela, déjà, impeccable. Et puis, hier soir donc, avançant un peu plus dans le texte, je comprends soudain – comment est-ce qu'on comprend ? par quelques subtils indices disposés çà et là – ce qui est en train de se passer. Il est 23h30 et j'ai sommeil mais je ne veux (peux) plus lâcher. Je suis avec ces quelques hommes et femmes, là, ne peux (veux) plus les laisser. Je lis jusqu'au bout.
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Qui a déjà lu Sommes ne s'étonnera pas que j'ai eu du mal à m'endormir après ça. À ceux qui ne l'ont pas lu, je dis "précipitez-vous dessus". Et je crois même savoir qu'Emmanuel Adely en fera une lecture complète samedi 5 décembre à 17h dans le cadre de Relectures à l'espace Khiasma. Re-lectures ? Je ne pouvais pas laisser passer ça.
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ps : la photo de ce message est un détail de la couverture, lui-même détail de Détail (1-35327) de Roman Opalka, avec qui le texte entretient une certaine relation.
-Frédéric Forte
* Publié aux éditions Argol dans la collection Interférences.

samedi 28 novembre 2009

Megérkeztünk, un mot hongrois

Un séjour oulipien à Metz m'a tenu éloigné du blog mais, avant de cogiter demain sur mes histoires de formes fixes, me re-voici aujourd'hui avec Megérkeztünk – le premier mot de l'opéra de Béla Bartók, A kékszakállú herceg vára (Le château de Barbe-Bleue) – qui veut dire quelque chose comme "nous y sommes", un mot hongrois.
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Nous y sommes donc, mais où ?
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Je ne suis pas sûr qu'un titre doive être "facile d'accès", ni qu'il doive renseigner le lecteur potentiel sur ce qui se cache sous la couverture. Ou plutôt, j'envisage idéalement deux manières d'intituler un livre :
— l'une où le titre dit tout : le livre contient des sonnets, des poèmes de métro ou est le résultat d'une collecte, raconte une histoire d'amour ? Alors appelons-le Sonnets ou Poèmes de métro ou Une collecte ou Un amour.
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— l'une où le titre ne décrit pas du tout, ou pas exactement, le texte qu'il désigne : Zazie dans le métro, Autobiographie chapitre 10, Assez parlé d'amour.*
J'ai jusqu'à présent plutôt pratiqué la première manière mais je suis fasciné par la seconde. Megérkeztünk, un mot hongrois, si jamais je l'écrivais, entrerait dans cette catégorie. Le lecteur se demanderait jusqu'à la fin ce que viendrait faire là ce titre et à la fin je lui dirais :
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"Voilà. Nous y sommes."
Frédéric Forte
* C'est moi qui souligne.

mercredi 25 novembre 2009

Homme-hélicoptère

Je l'ai écrit dans un cahier bleu, donc je me dois d'en faire mention ici. Même si je n'ai aucune idée de ce que j'avais en tête avec un titre pareil. Homme-hélicoptère… Et pourquoi pas Fourmi-bulldozer ou Poisson-chasse-neige ? Rien dans les cahiers ne donne le moindre début de piste.
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Ce qui m'amène à formuler l'hypothèse suivante : un certain nombre de titres n'ont été notés que pour se retrouver, quelques dix années plus tard, sur ce blog et servir de matériau potentiel pour le livre Re-.
Re- ne serait donc pas une rétrospective de mon (court) passé poétique mais la réalisation d'un projet inconscient, impensé mais néanmoins, présent dès le début.*
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* C'est un peu tiré par les cheveux, je vous le concède. Mais si ça me fait plaisir…

lundi 23 novembre 2009

Usine à gaz

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Après relecture des messages libellés fausses pages, je sens bien que mon raisonnement court le risque d'apparaître comme une véritable usine à gaz (si ce n'est déjà fait). Tout simplement parce que je continue à vouloir conceptualiser un objet – la "fausse page" – sans l'expérimenter.
Si je parviens en effet sans mal à visualiser les formes fixes que je souhaite pratiquer dans Re-, c'est parce que de nombreux exemples préexistent à ma réflexion. Bien sûr, la composition de ces poèmes apportera sans doute aux modèles adaptations, déformations, distorsions, mais j'aurai déjà en amont une base solide.
Pour les fausses pages par contre, a) je ne possède pas de modèle formel et, qui plus est, b) déclare vouloir jouer avec la notion d'informe. Pas étonnant qu'au bout de quelques temps, sans matériau à éprouver, la machine tourne à vide.
Le constat m'amène donc à interrompre la rubrique fausses pages jusqu'au moment où je commencerai réellement à les écrire, ces fausses pages. À partir de là, la réflexion pourra reprendre sur la base classique de l'expérimentation.
Ce qui m'amène à dire que je ne sais pas encore si les textes et les poèmes qui constitueront Re- au final apparaîtront en clair ici, sur ce blog. Faut-il que le blog ne soit que la périphérie du livre ou bien doit-il en contenir quelques échantillons, voire tout englober ? Réponse autour de janvier 2010.
En attendant, je vais continuer à lister mes titres potentiels et affiner la structure des belles pages. Et puis, je ne suis pas à l'abri d'une nouvelle contradiction…
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Frédéric Forte

dimanche 22 novembre 2009

Banzuke / Glossaire des mémoires d'un lutteur de sumô

J'ai déjà parlé dans S, U, M, O de mon amour pour cet art. Je ne serais pas complet sur la question si j'omettais de dire que cet amour repose aussi sur un plaisir de la langue.
Même si l'on ne parle pas le Japonais, ce qui est mon cas, il est difficile de résister au véritable feu d'artifices onomastique déployé dans le banzuke – c'est-à-dire le tableau de classement des lutteurs de sumô – qui est à la fois un objet formel, utile au déroulement de la compétition, mais aussi un objet de langue, où les noms des lutteurs sont calligraphiés en tailles différentes selon l'importance de chacun*. Un objet graphique donc, qui est bien plus qu'un outil de classement.
Aussi, lorsque j'ai commencé à écrire les quarante portraits qui composent Banzuke, le choix du titre était déjà tout désigné. Et, de même, les titres des différentes parties du livre renvoient aux divers "rangs" des lutteurs (yokozuna, ôseki, sekiwake, komosubi, maegashira) comme les titres des poèmes sont les noms de quelques-uns d'entre eux.**
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Cela dit, si je me penche sur Glossaire des mémoires d'un lutteur de sumô – qui est le texte faisant suite dans le livre à la partie Banzuke proprement dite –, je constate avec amusement qu'il repose sur le principe suivant : transformer tous les mots d'un glossaire*** en noms propres. Mon ignorance du Japonais associée à ma fascination pour les noms de lutteurs m'ont amener à en produire de manière automatique à partir de termes pris dans le "champ" du sumô.
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Ce qui peut se traduire par : "quand il lit du japonais, il voit des sumô partout."
-Frédéric Forte
* J'allais écrire "le poids", mais cela aurait pu prêter à confusion.
** Savoir qu'un lutteur ne combat pas sous son véritable patronyme mais sous un pseudonyme permet de mesurer l'importance de la "nomination" dans le sumô.
*** En l'occurence, le glossaire du livre Mémoires d'un lutteur de sumô donc.

jeudi 19 novembre 2009

Deux photos-minute / hors-sujet

Aujourd'hui, à peine le temps d'un petit hors-sujet avant d'être privé d'ordinateur pour deux ou trois jours.
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Alors deux photos.
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Intérieur :
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Extérieur :
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Ne me demandez pas quel sens ça peut avoir, c'est juste du remplissage. Mais alors à quoi bon poster un message ? Dictature du blog, insidieuse addiction.*
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Je décrocherai, je vous (me) le promets.
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* Tiens, c'est un alexandrin…

mercredi 18 novembre 2009

Scorpions et autres machines

Les autres apprestoient arcs, fondes, arbalestes, glands, catapultes, phalarices, micraines, potz, cercles et lances à feu, balistes, scorpions et autres machines bellicques repu-gnatoires et destructives des Helepolides. (Rabelais, dans le prologue du Tiers livre)
J'ai toujours beaucoup aimé le mot "machine" – j'aime bien aussi le mot "scorpion", plus pour ses qualités typographiques et sonores que pour la bestiole qu'il désigne en tout cas, et sans doute que la machine de guerre citée par Rabelais et "qui lance de gros projectiles" nous apprend le Robert Historique.
Une forme fixe, qu'est-ce que c'est sinon une petite machine à fabriquer (en série) du poème ?*
Alors forcément, lorsque, toujours à l'affût de titres potentiels, je suis tombé sur ce passage du Tiers livre, je n'ai pas résisté.
Mais vous ne serez pas étonné si je vous apprends que je n'en ai rien fait. Je n'ai pas su ce que pouvait être ces "scorpions" poétiques.
Je me dis qu'après tout ce n'est peut-être pas plus mal, car cet été, dans les Cévennes, j'en ai un petit peu trop croisé dans la salle de bain…
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-Frédéric forte
* J'ai, dans Opéras-minute, utilisé le terme pour qualifier des formes poétiques à "actionner" par le lecteur lui-même.

mardi 17 novembre 2009

Fred Léal, Franck Pruja & Françoise Valéry

Mercredi 25 novembre à 20h au Comptoir des mots, nous aurons le plaisir de recevoir Françoise Valéry & Franck Pruja, maîtres-queux des Cuisines de l'Immédiat (alias Les éditions de l'Attente) ainsi que Fred Léal*, auteur de livres ineffables et (presque) carrés aux mêmes éditions.
Il y aura de l'émotion, du suspens et surtout le trio interprétera a cappella un chant landais. À ne manquer sous aucun prétexte.
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* Cliquez sur son nom et, vous verrez, vous serez aussitôt renvoyé à sa présentation sur le site des édtions P.O.L (car Fred est aussi un auteur P.O.L).

dimanche 15 novembre 2009

Ha¨ku

Des Haïkus pour mémoire dont il est question dans la longue liste de titres, c'est amusant, je n'ai gardé aucune trace*. Ce haïku me donne cependant un prétexte pour expliquer comment peut naître un projet de livre.
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Je m'explique. Une fois sur trois lorsque je tape le mot "haïku" sur mon clavier, j'oublie le i et cela donne "ha¨ku". Un petite bonheur typographique.
Ha¨ku où peut se lire, malgré le blanc, le nom de la forme.
Ha¨ku qu'on peut lire également "à-coups" ou "à coups", au choix.**
À coups de quoi ? Justement, on ne sait pas.
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C'est la multiplicité des possibles qui fait de Ha¨ku, à mes yeux, un excellent titre potentiel. Le i manquant – et la présence du tréma qui maintient malgré tout l'intégrité du mot – engendre une foule de questions formelles. Quelle sorte de haïkus est-on amené à écrire dans un livre qui porte ce titre-là ? Comment reformuler cette absence dans la forme fixe ? Porterait-elle sur ses éléments objectifs (métriques, prosodiques) ou sur la subjectivité du poème ? Sur les deux sans doute, mais selon quels critères ?
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On a ici affaire à la même potentialité, générée par coquille typographique – ou "lapsus calamachine" – que celle rencontrée par Jacques Jouet lorsque il est un jour tombé sur la phrase affirmant que "Les trois contes de Flaubert sont le sonnet de son œuvre". Il a répondu au défi potentiel par un texte programmatique que l'on peut maintenant lire en postface de ses Trois pontes (P.O.L, 2008), qui sont la mise en application de la solution théorique.***
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Je n'ai pas l'intention pour l'instant de donner à Ha¨ku un contenu.**** Je considère cependant comme un luxe qu'après presque dix années d'existence le livre potentiel titré Haïkus pour mémoire vienne de se trouver un nouveau nom illustrant pour le mieux l'usure, le manque, la perte irrémédiable subis par la mémoire : Ha¨ku. On peut aussi voir là le comble de la fumisterie.
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addenda : je tape "haku" sur google et découvre que cela signifie blanc en japonais.
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* En y réfléchissant, je crois tout de même me souvenir de quelque chose, mais ça reste vague.
** Je laisse de côté d'autres prononciations de ku.
*** Le travail de JJ est toutefois bien plus complexe car il doit tenir compte du patron narratif qu'est le texte de Flaubert et y "voir" la structure d'un sonnet !
**** Mais qui sait ?

samedi 14 novembre 2009

Poèmes panoramiques

Après les poèmes stéréo-phoniques, les panoramiques… Je devais avoir quelque suite dans les idées, il faut croire : écriture, espace, etc.* Et cette fois-là, j'ai tout de même composé quelques poèmes. En voici un, premier essai que j'avais titré Prototype. Il a le mérite d'être daté et donc de faire surgir, juste pour moi, une petite arche temporelle entre là-bas ce jour-là et ici maintenant. Et bien sûr, comme pour tout le monde, pas mal d'eau depuis a coulé sous ce pont.**
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Le cahier bleu-------la table vide-------la chaise vide
contre le mur blanc-------la liasse de feuilles jaunes
sur le cadre rouge à la verticale----___--au plafond
les fissures-------le lustre "fééristique"-_----éteint
le fauteuil marron-----le tapis de natte-_--ma chaise
-------
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Le chauffage au gaz----__--la théïère design
la carte postale sous verre-----(un chat blanc
et noir assis sur un banc bleu-----palissade blanche)
le plat marocain à la verticale -__au plafond
les fissures--_le lustre "fééristique"---éteint
sur la table jaune------conte l'accoudoir droit
du canapé aux motifs exotiques-------la lampe
bleue à l'abat-jour crème-----le tapis de natte
l'arrête de la table-------ma chaise
-------
5 février 2000
Salon - salle à manger
du 16, rue Saint Hilaire
-Frédéric Forte
* Non, je ne développerai pas.
** Ce qui, conceptuellement, est assez surprenant : si temps = arche = pont et que eau = temps également, alors cela voudrait dire que le temps s'écoule perpendiculairement à lui-même…Une découverte.

vendredi 13 novembre 2009

Ligne 13

Je me fais ici l'écho d'une bonne nouvelle : les poètes Francis Cohen (Monsieur le Gros Monsieur, ZWAR, L'autoportrait chronique) et Sébastien Smirou (Mon Laurent, Beau voir) créent une nouvelle revue de poésie qui a pour nom Ligne 13.
Le premier numéro paraîtra en avril 2010 mais on peut d'ores et déjà s'abonner à la revue en passant par le blog (sommeillant) de Sébastien, Si tu vois ce que je veux dire. Vous trouverez là plus de détails sur l'esprit de la chose et les participants au n°1, dont je suis.
Et puis, vivant moi aussi sur le parcours de la ligne 13, je ne peux qu'être enthousiaste à l'idée d'une revue pour laquelle les lecteurs seront, pour une fois, je l'espère, heureux de se presser comme des sardines.

jeudi 12 novembre 2009

Hors-sujet / hors-sujet

En observant le contenu des rubriques, je me suis rendu compte que la rubrique Hors-sujet ne contenait qu'une entrée*. Je trouve ça dommage. Car Hors-sujet, voilà un bien bel intitulé pour une rubrique, vous ne trouvez pas ? Alors, écrivons un "hors-sujet".
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Tout d'abord, je prends une photo de l'endroit où je suis assis**, sans trop réfléchir…
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Voilà.Une moulure. Ça mange pas de pain, une moulure…
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Ensuite, je peux parler de n'importe quoi. C'est le principe du hors-sujet, n'est-ce pas ?
Par exemple des mots composés en hors-quelque chose : -bord, -d'œuvre, -jeu, -catégorie, -pair, -concours, -cadre… -La-loi. J'ai faillit oublier -la-loi. Et il y en d'autres qui ne me reviennent pas présentement. Je pourrais regarder dans un dictionnaire mais non, ce serait de la triche…
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La la la la la…
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Le temps est plus doux aujourd'hui, vous avez remarquez ? À Paris, je veux dire…
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Hum…
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Bon.
Je crois que j'ai fait le tour de mon hors-sujet de ce soir.
Je ne veux pas vous retenir plus longtemps…
Et vous promets pour demain, ou après-demain, un message de fond, riche, profond, subtil, bien équilibré, avec des révélations et du mystère, en plein dans mon sujet, qui est Re-, je vous le rappelle.
-Frédéric Forte
* Paradoxe, car avec ce texte désormais ça fait deux.
** Pas "de l'endroit" mais "à partir de l'endroit". Je ne suis pas assis sur une moulure du plafond.

mercredi 11 novembre 2009

Cinq minutes un peu partout

Il y a des titres qu'on oublie alors qu'on ne devrait pas. Celui-ci par exemple. Et maintenant que je l'ai retrouvé, je le recyclerais bien pour un projet futur.
Cinq minutes un peu partout est un titre elliptique ; en réalité, le segment final d'une proposition dont le début serait "Faire des prises de sons de…"
Mon travail, outre l'action d'appuyer de temps à autre sur la touche play de l'enregistreur, serait d'élaborer un système de notation pour restituer les enregistrements. Une sorte de partition.
Frédéric Forte

mardi 10 novembre 2009

De l'informe

Si j'ai, plus ou moins, explicité ici le processus de "remplissage" que je comptais mettre en place pour les fausses pages de Re- – une sorte de mouvement rétrograde par lequel le faux texte découle en fait du poème à forme fixe qu'il précède –, je n'ai pas d'idée précise sur la façon dont je vais traiter leur contenu proprement dit. Quelle sera l'aspect de chacun des faux textes ?
Je suis confronté au problème du "pas-de-forme".
Je précise que c'est un problème pour moi et que je ne veux pas dire par là que les textes non formalistes n'ont pas à mes yeux de valeur poétique ou littéraire. Ils en ont. Simplement, ma pente naturelle me pousse toujours à formaliser ce que je veux écrire avant de l'écrire.
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Dans le cas des faux textes, se posent la question du contenu et celle de sa mise en page – pour ne pas dire "mise en forme". Mais les deux questions sont en fait intriquées.
Le contenu, on l'a dit, découlera du poème à forme fixe qui lui-même s'inspirera des messages de ce blog. Mais je ne sais pas encore dans le détail quel type de texte ce sera. Car si relation il y a avec le poème, il ne faut pas non plus qu'il y ait redondance ; n'oublions pas "l'abîme des deux marges intérieures" qui sépare fausse et belle pages…
Je ne perds pas non plus de vue le sens originel de faux texte en typographie (c'est d'ailleurs pour ça que je parle au début de ce texte de "remplissage" et non pas d'"écriture"). Pour ce faire, il faudrait que les textes ne soient pas trop "écrits" justement mais aient l'apparence d'un montage, d'un collage de fragments, d'extraits, n'ayant pour autre but que de tester la mise en page.
J'ai bien conscience que le procédé est artificiel et contre-nature. Mais tout l'intérêt est là.
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Bref, je ne suis pas encore arrivé. Et si je ne suis pas certain que ce message soit la fusée éclairante que j'espérais, il a tout du moins le mérite de ne pas me laisser totalement dans le noir.
Frédéric Forte

lundi 9 novembre 2009

Poèmes stéréophoniques

Stereo = l'espace, et phono = le son. C'est au final ce qu'incarne, ou devrait toujours chercher à incarner, le poème sur la page.
Je n'ai jamais, à strictement parler, écrit un seul de ces poèmes stéréophoniques. Mais les 7 quatuors à cordes, a,o,é,on ou, plus tard, les Opéras-minute sont des avatars de cette préoccupation "stéréophonique".*
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Je la retrouve même aujourd'hui, sous une autre forme, dans ce qui est l'objet principal de ce blog, le projet Re-, avec sa balance** fausses / belles pages.
-Frédéric Forte
* Après vérification sur un cahier bleu, je m'aperçois que le titre apparaît juste avant que j'imagine les 9 poèmes en forme d'accordéon d'a,o,é,on.
** Le mot "balance" évoque toujours pour moi les amplis des chaînes stéréo avec leurs trois potentiomètres : bass, treble, balance.

dimanche 8 novembre 2009

1, 2, 3… et 4 ? (la question de la forme fixe, 5)

Dans Môyenageû, je concentre mon attention sur trois formes fixes – rondel, triolet et villanelle – et pour chacune je fournis un exemple tiré de mon livre Opéras-minute. Si je poursuis sur la lancée, il me faudrait pour Re- logiquement choisir une forme parmi ces trois.
Oui mais… Plus ça va, plus je les tourne et retourne entre mes doigts*, et moins j'ai envie de faire un choix. Aucune ne se détache des autres. Ex-æquo parfait. Alors pourquoi trancher ?
Si je décide cependant de conserver les trois, un compte ne va plus. 44 divisé par 3 ne fait pas un nombre entier. Or, si égalité il y a, il faut qu'elle existe aussi dans la quantité de poèmes réglés par chacune.
La solution me paraîtrait être donc d'ajouter une quatrième forme fixe – chaque forme ayant ainsi ses 11 poèmes (cf. Dites 33) –, mais laquelle ?
Lors de mon inventaire dans la Forêt de formes, j'ai peut-être écarté trop vite celle-ci : la ballade. Qui n'est pas si longue qu'elle ne pourrait pas tenir sur une page. Et qui connaît elle aussi le retour de vers.
-
vite. l'absence de décor.
(frontière : arête du nez)
seule la présence du corps
en ce creux. prenez voix tenez
ferme la rampe oh entonnez
l'hymne ici bas. this wall of shame.
et n'oubliez pas ce qui compte.
-
oui demain pour un autre sort
en la lumière malmenez.
hantez les sacs le moindre port.
faites le tour. appartenez.
là d'un simple geste apprenez
cette danse sin verguenza.
et n'oubliez pas ce qui compte.
-
maintenant. confondez la mort.
dites bonjour. dodelinez.
faites bien semblant d'avoir tort.
à l'heure du thé obtenez
mille excuses. allez. prenez
l'air mais pas trop. n'ayez point honte.
et n'oubliez pas ce qui compte.
-
Ce poème, comme les trois autres, est tiré d'Opéras-minute.
À les observer tous les quatre, transparaît un air de famille (plus ou moins) évident. Mais, surtout, j'aime que leurs tailles soient toutes différentes :
8 vers (2+2+4) pour le triolet, 13 (4+4+5) pour le rondel, 19 (3+3+3+3+3+4) pour la villanelle et 21 (7+7+7) pour la ballade.
-
Il y a du pour et du contre : on reste certes dans les formes moyenâgeuses mais on a quatre fois moins de place pour explorer une forme ; on gagne en variété mais on perd en "variations"…
Cela dit si je voulais éviter que ce soit le "livre d'une forme", je ne pourrais pas mieux m'y prendre.
Et utiliser quatre formes au lieu d'une ouvre sur de nouvelles questions de structure : enchaîner 11 par 11 les 4 formes ou bien les faire permuter selon un principe de n-ine (ou autres) ?
-
Je vais laisser reposer tout ça et on verra bien.
- Frédéric Forte
* J'aime bien imaginer les poèmes, les formes poétiques comme des objets. Conceptuels certes, mais objets tout de même, en 3 dimensions, préhensibles.

vendredi 6 novembre 2009

Grilles

Chez moi, en général, le titre vient d'abord. Avant le texte. Avant même parfois l'idée du texte ("Patate légale !… Tiens ! Ça, ça ferait un bon titre !" Oui, mais de quoi ?)
Plus rarement pourtant, le titre a du mal à venir. On avance dans l'écriture et, pour ce que l'on est en train de faire, aucun nom ne s'impose. On tâtonne, on donne un titre provisoire, puis un deuxième titre provisoire, on revient au premier et c'est finalement un tout autre qui l'emporte (ou aucun : le projet s'est perdu au fond d'un tiroir).
Prenons Grilles, par exemple. Je travaillais à partir de définitions de mots croisés composées pour des grilles réalisées par mon père ; des poèmes minimaux de 2 vers la plupart du temps. Grilles, Poèmes de grilles… J'hésitais à les nommer. Le nom ne me semblait pas évident. Peut-être parce que je ne voyais pas de "grilles" dans le résultat…
Le travail terminé, vers 1999-2000, je le rangeai dans un dossier, n'y pensai plus. Et puis, en 2005, j'entrai à l'Oulipo et, quelques temps plus tard, resongeai à ces poèmes qui pourraient peut-être, à tort ou à raison, faire un fascicule de la Bibliothèque Oulipienne, dans la tradition des haïkaïsations de Raymond Queneau, des formes minimales inventées par Michèle Métail ou des monostications de Jacques Jouet… Bien. Mais il me fallait leur trouver un titre.
La solution qui émergea fut de titrer l'ensemble d'un vers (i.e. une définition) tiré d'un de ses poèmes. Ce fut Tubes chinois qui avait pour moi le mérite de dire, plus que "grilles", quelque chose de la forme.Frédéric Forte

mercredi 4 novembre 2009

Ex-

À quoi reconnaît-on un libraire ? Quand on déambule dans une librairie, qu'est-ce qui différencie un libraire d'un "simple" client ?
Il y a bien sûr le gilet ou le badge des grosses enseignes. Mais ce n'est pas de ces endroits-là que je parle.
Il y a le côté du comptoir où l'on se trouve. Mais ça peut-être trompeur.
Il y a le fait de se balader avec des caisses, des piles de livres en équilibre. Mais on peut être un acheteur compulsif.
Il y a la vitesse de déplacement dans les rayons. Mais on peut être pressé.
Il y a la manière d'interpeller quelqu'un à l'autre bout de la librairie. Mais on peut être sans gêne.
Et cetera, et cetera, et cetera.
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Non, à mon avis, la seule manière de reconnaître à coup sûr un libraire dans une foule de clients – et encore, cette technique ne marche qu'à la saison froide – c'est de chercher la tenue légère quand tout le monde est en manteau.
Et l'été, me direz-vous ? L'été, c'est tout bonnement impossible. Surtout quand le libraire n'a pas envie de travailler et se promène dans les rayons en feuilletant négligemment quelques ouvrages de ci de là.
Vous n'êtes pas convaincu, je le sens bien. Ceux à qui j'ai tenté d'expliquer ça hier soir au Comptoir des mots étaient comme vous.
Une sympathique cliente m'a dit qu'elle m'avait pris pour un libraire à cause de mon pull à rayures…
Rien ne distingue un libraire d'un être humain normal. C'est à désespérer.
Et le pire, c'est qu'on peut même parler de littérature avec les clients. Hier, Unica Zürn et Flann O'Brien.
-Frédéric Forte
Entre deux bavardages, j'ai tout de même pris le temps de coller un coup de cœur sur Ex-voto, a thousand steps and more de Gôzô Yoshimasu (paru au Petits Matins dans une superbe traduction de Ryoko Sekiguchi). La vraie découverte d'un grand poète japonais contemporain. Ce long poème, qui date de 1977, est une merveille. Comment dire ? Il donne l'impression de gambader avec facilité sur une ligne à haute tension, vous voyez ? Non ? Alors le mieux est peut-être de le lire.

mardi 3 novembre 2009

Listes

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Listes comme titre… Je dois avouer que je ne m'en souviens pas. Mais, au moins, l'intention programmatique est claire.
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Ce qui me fait penser que Re- recycle pas mal d'idées anciennes, les remet en perspective.
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Ce que fait toujours un livre, en fait…
-Frédéric Forte
Voilà. C'est tout pour aujourd'hui.

lundi 2 novembre 2009

Môyenageû* (la question de la forme fixe, 4)

Relisant le message Forêt de formes, je me suis rendu compte d'une erreur, doublée d'un oubli.
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Sauf à user d'un corps réduit pour la police de caractères, le virelai – en tout cas, dans la variante que j'ai utilisée pour Opéras-minute – aurait du mal à tenir sur une seule page.
Et d'autre part, j'ai oublié d'indiquer dans ma liste de formes fixes le triolet qui, lui, colle parfaitement aux critères.
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Bien sûr, dans le message en question, erreur et oubli sont tous deux désormais réparés. C'est l'avantage du texte numérique, non ? Mais la question de la forme fixe n'en demeure pas moins.
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J'avais, rappelez-vous, émis l'idée d'un "renga solitaire" qui me semble, avec le recul, redondante avec le projet de chôka évoqué dans S,U,M,O, et surtout une aberration conceptuelle.
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Restent les formes moyenâgeuses. Je ne vais pas faire mon choix encore. Mais ci-dessous, pour me remettre ces formes en tête, quelques poèmes extraits d'Opéras-minute.**
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Un rondel :
-
Tels les sièges à cariatides
Accrocher la mémoire du corps
s'il est des mains savoir encor
Pousser la limite du vide
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Que rien ne soit ni ne décide
Se taire se taire se taire à tort
Tels les sièges à cariatides
Accrocher la mémoire du corps
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Faire beau temps parmi les rides
S'éloigner à la nage du bord
Faire celui qui presque dort
Friser le trans le translucide
Tels les sièges à cariatides
-
-
Une villanelle :
-
La machine inquiète
Bœuf - charrue - sillon
Ça qui marche marchant
-
Pour la cause indéterminée
Pour ailleurs le mouvement
La machine inquiète
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Dans l'enchevêtrement
Ombre / ombre
Ça qui marche marchant
-
Apportant le trouble
Message (son transport)
La machine inquiète
-
Remuant tant et si bien
Pensées engrenages
Ça qui marche marchant
-
Le poème-problème
Aimerait solution
La machine inquiète
Ça qui marche marchant
-
-
Un triolet :
-
Mais tu ne recommences pas
Et quel est le poids de ta tête ?
-
Il faudrait rire à chaque fois
Mais tu ne recommences pas
-
C'est aujourd'hui. Il pleut papa
Toujours et personne n'arrête
Mais tu ne recommences pas
Et quel est le poids de ta tête ?
-Frédéric Forte
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* Prononcez "mo-yen-a-gué-ou". Ce n'est pas du japonais, mais ça y ressemble…
** et désopéra-minutisés, puisqu'extraits de la méta-forme qu'est un opéra-minute.

dimanche 1 novembre 2009

Un calendrier

Je poste des messages sur ce blog plus ou moins tous les jours*, mais vers quoi vais-je** exactement ?
Vers l'écriture d'un livre qui aura pour titre Re-, certes. Mais à quelle allure ? Je répondrai : pas trop vite.
Dans l'idéal, je souhaiterais qu'au terme de ma résidence, le 30 juin 2010, la matière du livre soit définitivement écrite. Ne resterait alors à mon éditeur, Théâtre Typographique, qu'à "fabriquer" l'objet. Et même cette cuisine-là, j'aimerais qu'on puisse ici en suivre les prémices…***
Pour ce faire, il me faut produire, d'ici 8 mois maintenant, 44 poèmes ainsi que les 44 "faux textes" y attenant.
Or, je ne fais jusqu'à présent, si vous me suivez bien, que ruminer mon livre, parlant ici de fausses pages, là de formes fixes, poursuivant ailleurs une "rétrospective" de mes titres potentiels ou bavardant sur ce qui veut bien occurir au Comptoir des mots.****
Le nombre 44 correspond, je l'ai dit dans les 99 notes préparatoires à Re-, au nombre de semaines de ma résidence. Il est donc d'ores et déjà certain qu'il me faudra écrire plus d'un poème – et son faux texte – par semaine si je veux combler le retard en train de s'accumuler (9 semaines à rattraper pour l'instant mais bientôt plus).
C'était prévu.
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Il me faut, avant de passer à la composition proprement dite*****, achever de répondre aux questions formelles que me posent belles et fausses pages. Je prévois d'en être venu à bout, avec l'aide éventuelle de vos commentaires, au plus tard le 15 décembre. Après quoi, j'accueillerai au Comptoir, le 16 décembre, Paul Otchakovsky-Laurens et Sébastien Smirou, puis partirai le 17 dans le Michigan, avec ma petite famille, pour une durée de 1 mois.
Je ne dis pas ça pour vous raconter ma vie****** mais parce que c'est bien dans cet état-là*******, coincé par la neige et les environs de Noël, que je compte me mettre aux premiers poèmes de Re-.
Ensuite, progressivement, mais pas trop vite, je réduirai le décalage entre semaines et poèmes jusqu'à composer mon 44ème poème, le 30 juin au soir.
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N'est-ce pas un beau programme ?
-Frédéric Forte
* Après vérification : tous les 1,57 jours (35 messages en 55 jours, celui-ci inclus).
** Non, ce n'est pas une contrepèterie.
*** Selon un principe de chamboulement des étapes "naturelles" d'élaboration d'un livre, je voudrais qu'on puisse commencer à parler des détails éditoriaux de Re- avant que l'écriture n'en soit achevée.
**** Je ne crée pas de liens vers les rubriques, hein ? Jeter un œil sur la colonne de droite.
***** Par composition, j'entends "écriture poétique" (le terme me vient de Jacques Roubaud).
****** Quoi que…
******* Le Michigan, donc.
 

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